Beaucoup de bruit pour rien
N'allez surtout pas vous imaginer que j'ai adopté une attitude désinvolte face au "CPE Show", mais j'ai lu un certains nombre d'éléments ces derniers jours qui ont tendance à me laisser penser que finalement l'opposition ne souhaite pas tant que ça le retrait du CPE... Aie ça y est, je vois débouler les anti CPE et former le peleton d'exécution !!
Laissez moi développer mon scénario peut être purement fictif et ensuite vous me direz si finalement il n'y a pas un fond de vérité...
La gauche réclame haut et fort le retrait du CPE, alors qu'elle sait pertinemment que d'un point de vue juridique c'est impossible aujourd'hui.
Les sénateurs et les députés ont saisi le Conseil constitutionnel la semaine dernière et le recours porte sur 4 points :
- rupture d'égalité entre les salariés,
- rupture d'équilibre entre le droit à l'emploi et le droit de licenciement,
- non consultation préalable du Conseil d'Etat,
- caractère cavalier du CPE, sans lien avec le sujet du projet de loi sur l'égalité des chances.
Tant que le Conseil n'aura pas rendu sa décision, il ne peut rien se passer et les sages ont un mois pour se prononcer.
Les déclarartions à répétition dans la presse ne servent à rien pour l'instant, juste à alimenter la contestation.
Quand Julien Dray affirme que le Premier ministre "s'enferme dans sa tour d'ivoire en refusant de retirer le contrat première embauche", il est en totale contradiction avec l'action intentée par son parti et je rajouterai de mauvaise foi quand on sait que Dominique de Villepin ne cesse d'appeler au dialogue opposition et syndicats depuis la semaine dernière.
Une fois de plus le PS joue une partie un peu trouble. Il serait naïf de croire que le PS n'a pas conscience aujourd'hui qu'une réforme du monde du travail est indispensable si l'on veut redynamiser le marché de l'emploi dans notre pays. Mais ce genre de réforme est toujours douloureuse et on sait combien ce parti réchigne à les mettre en place de peur de se couper de son lien "social".
On ne veut pas froisser l'électorat et on laisse bien souvent la droite s'y coller quand elle revient "aux affaires" et que l'on a atteint le point de non retour (retraites, sécu...).
Aujourd'hui on est dans un cas de figure similaire. La mutation est inévitable et l'opposition n'a rien dans sa "musette", on le constate depuis des mois.
Et si finalement le CPE était la chance du PS pour redorer son blason ? Une fois encore elle laisse la droite aller au charbon, essuyer les platres, se frotter à la vindicte de l'opinion publique. Les ténors du PS montent au créneau, juste ce qu'il faut, mais pas trop on ne sait jamais, en restant dans un vague discours idéologique, mais en jetant en pâture dans l'arène de jeunes syndicalistes, qui croient tout savoir, ou pire arrogant, comme Bruno Julliard, qui s'imagine, en posant des ultimums au gouvernement, pouvoir se substituer au pouvoir exécutif de ce pays.
Avec le CPE devant le Conseil constitutionnel la gauche gagne du temps, fait monter la pression dans le pays, retrouve son électorat perdu et je ne serai pas surprise qu'elle rêve secrètement que les sages n'invalident pas le texte. De plus, elle connaît maintenant la détermination du gouvernement à mettre en application la loi et à en mesurer les effets à la loupe.
L'opposition va donc mettre à profit ces semaines d'incertitude pour faire de cette contestation un motif de rassemblement autour d'elle, ramener les égarés vers la bergerie et capturer cette jeunesse qui soufre d'un profond malaise... tout ça en vue de 2007.
Mais, me direz vous, si le CPE marche, la gauche n'en tirera aucun proft... Pas sûr... je le répète, je suis persuadée quelque part que la gauche espère le succès de ce contrat, parce qu'avec lui c'est l'amorce de la réforme qui s'écrit. En faisant de la surenchère sur le thème de la précarité, l'opposition aura trouvé son thème de campagne, elle trouvera bien des critiques à formuler sur le CPE mais en même temps elle n'aura pas eu à prendre le risque de poser les premières pierres de cette réforme... En un an, l'idée aura fait du chemin dans les esprits et peut être que la société sera peut être prête à accepter ces changements. Alors si la gauche revient au pouvoir en 2007, elle fera quelques arrangements à sa sauce, mais ne reviendra pas en arrière.
Donc sauf avis contraire du Conseil constitutionnel, le CPE sera !!
Et on peut se demander jusqu'à quand le gouvernement laissera sa porte ouverte pour des négociations avec les partenaires sociaux sur des aménagements du texte. A vouloir refuser en bloc de venir s'asseoir autour de la table, les syndicats pourrait bien voir finalement la bombe qu'ils ont amorcée leur exploser à la figure.